Le Moi Et La
Formation De
L'Inconscient
Décryptage
De La Religion De
l'Egypte Ancienne
Quelques extraits
Voici, en quelques lignes, le fond et le message de la religion osirienne.
Osiris est l’époux et le frère d’Isis. Son frère Seth l’a tué et découpé en quatorze morceaux qu’il a éparpillés. Isis, par sa force magique, retrouve les morceaux et le ressuscite pour concevoir de lui un fils, Horus. Après avoir conçu Horus, Osiris redevient le dieu mort mais présent tout comme s’il était vivant. Il est l’objet de vénération de la part d’Horus et préside au jour du jugement du mort. Horus vengera son père et émasculera Seth qui arrive pourtant à lui crever un œil qui guérira.
Osiris est l’être-bon comme le dit le Livre ; il est la tendance initiale de l’être humain à aller vers la cohérence. Ce bon côté cohabite avec une tendance qui ne veut que s’accaparer sans se soucier du respect d’autrui et de la cohérence qui l’entoure, politique d’action qui réduit l’éveil intérieur en limitant l’ouverture vers l’extérieur. Ce côté égoïste est Seth, l’élan-vers-l’ego.
Le bon côté initial qui est Osiris aurait dû être actif mais il est mis hors d’état d’agir par le développement de Seth qui, depuis la naissance de l’enfant, réduit peu à peu la possibilité de son expression. Alors est invitée à se construire une nouvelle composante psychique qui est le fruit de la relation de cet élan du moi rendu inactif qu’est Osiris et d’Isis que je présente à ce niveau de mon exposé comme étant l’activité positive de l’éveil intérieur. Ce nouvel élan du moi est l’élan-cohérent, Horus. Il pourra se développer sous la bonne influence de l’activité mentale positive et depuis la bonne graine de base qu’est Osiris ; son but sera de contrebalancer la tendance égoïste qu’est l’élan-vers-l’ego, Seth.
L’âme, entravée et alourdie par Seth, n’existe plus dans sa liberté d’action passée ; elle devient prisonnière de la matière, prisonnière de la densification dans un corps matériel. Elle est ipso facto limitée dans ses capacités. Là, on est en face de l’homme dans ses dimensions physique, mentale et spirituelle, l’homme qui est le récitant du Livre et qui a un moi à deux élans antagoniques : Horus et Seth. Celui qui s’intéresse au combat entre Horus et Seth ne peut être qu’Osiris qui comptabilise sa situation, réincarnation après réincarnation. Le but du récitant est d’arriver en fin de parcours de sanctification et après plusieurs réincarnations à échapper au piège de la densification et à quitter définitivement l’enveloppe charnelle.
Mais remonter la pente signifie permettre le développement de l’éveil intérieur dans un sens positif qui s’ouvre au respect de la cohérence ; pour cela l’influence de Seth doit être contrecarrée, le chemin de la progression sera alors ouvert. L’homme doit connaître et favoriser l’épanouissement des paramètres psychiques capables de l’aider : les dieux et les déesses. Il doit aussi identifier les paramètres capables de retarder sa progression : les démons. A entrer dans les méandres d’un tel projet on remarque qu’il est à la fois psychologique, religieux et philosophique. Toutes ces disciplines ne peuvent que converger ; ou plutôt n’étaient-elles qu’une seule à la base et que l’homme a subdivisée pour y voir plus clair !
On pourrait se dire que c’est là une thèse très audacieuse pour une civilisation primitive dont la religion à têtes de chacal et de vache semble plus proche de l’animisme et de la magie que d’une logique élaborée. On pourrait dire aussi qu’on n’a pas découvert chez les anciens égyptiens de vrais mouvements philosophiques qui laissent supposer un brassage d’idées et un développement progressif de la pensée, ils n’ont que cette religion ; comment donc une logique si bien cousue peut-elle leur être attribuée? L’argumentation est bien placée. Et pourtant si le Livre Des Morts tient la route avec une telle logique et s’il se permet d’aller dans la description des dynamiques psychiques, n’est-ce pas là des coïncidences difficiles à expliquer ?
On pourrait dire aussi que ce n’est là qu’une autre religion qui vante le Bien et défend du Mal sous le signe de la récompense et de la punition comme dirait Freud, religion au goût fade et qui ne va pas loin. Cependant la religion osirienne ne repose pas sur l’étroitesse du moralisme et du châtiment ; son importance repose sur l’interaction entre les différents dieux et déesses. Elle invite au développement d’un nouvel élan du moi qui n’est pas le surmoi et elle oriente la progression psychique loin de la sublimation et du refoulement. Elle a de la sexualité une vision bien plus large que la vision psychanalytique. C’est d’ailleurs l’une de ses richesses : englober la psychanalyse tout en étant une religion.
Ainsi, les chapitres traitent des dynamiques entre les divinités. Pour que ces dynamiques gardent leur valeur et leur éclat, et pour ne pas les banaliser par ceux qui ne leur reconnaissent pas leur importance, les identités des divinités sont gardées secrètes. Le fait de connaître à quoi correspond chaque dieu ne constitue que le seuil d’entrée au monde superbe de ce Livre qui intéressera spécialement celui qui cherche à se découvrir dans le miroir de la Vérité.
Ce que le Livre Des Morts Des Anciens Egyptiens propose, c’est de s’ouvrir sur la façon selon laquelle les différentes composantes psychiques interagissent entre elles. Projet très prétentieux dirions-nous. Même notre vingt et unième siècle n’en est qu’à ses balbutiements dans la découverte du psychisme. Je laisse le lecteur découvrir ce que nos ancêtres initiés d’il y a plus de quatre mille ans savaient déjà.